Porto_2/2
Porto appartient à ses habitants. Secrète, provinciale et brillante, elle n’est pas encore peuplée au second degré, comme Paris ou Londres, gigantesques parcs d’attraction pour personnel nanti. Mais les programmes de réhabilitation feront leur œuvre, sans doute. Cela commence doucement, par les artistes et les fêtards.
L’après-midi, les vieux s’installent au bord du Douro, sur des chaises en plastique et jouent aux cartes. Les plus vigoureux ravaudent des filets, réparent les moteurs de barcasses hors d’âge. On se dirait sur les quais d’un chef-lieu de département, sur fond de hangars désaffectés, repris par la forêt. La ville grandit vers le nord et la banlieue, oubliant les rives du fleuve.
Raide, crevée par le Douro, Porto attend l’Atlantique, qui n’arrive jamais. A Lisbonne, le Tage s’étale, marquant l’amorce de l’océan, son début. A Porto, le Douro incarne sa fin, l’appel de la terre, des champs et des vignes.
L’océan, il faut aller le trouver à Foz do Douro, un quartier résidentiel qui longe l’Atlantique, un bord de mer jaune citron, comme dans les années trente. Les rochers laissent peu de place au sable grossier, qui donne de temps à autre une petite plage bleue. L’océan s’arrête là, brisé par les récifs, prenant la teinte translucide du ciel, sous le regard des anciens, des enfants et des pêcheurs à la ligne, au bord d’avenues appelant l’autre rive de l’Atlantique –Montevideo, le Brésil – et d’une pergola Belle Epoque, vestige d’un palais marin n’ayant jamais existé.